Plus tard
En plein midi radieux, dans le soleil d'été, quelqu'un vient dans l'Appartement pour se dire, qui apporte avec lui un vent froid étreignant tous ses habitants, mais qui s'échappe vite par nos ouvertures géographiques.
- C'est vous? Jacques Laprune?
Je ne suis pas sûre que ce soit lui, je ne le vois pas, puis je l'entends, c'est bien lui: Jacques Laprune, maire de Batbourg.
Je croyais que je ne sentirais plus rien, je croyais qu'après c'était terminé, qu'il n'y aurait pas de "plus tard".
Pourtant je sens le vent, il me rafraîchit, je sens l'odeur froide de l'eau des arroseurs automatiques qui se mettent en marche, dans les jardins de Batbourg, avec le jour qui se lève.
Je sens l'odeur du soleil, je n'avais jamais senti ça.
Voilà qu'il m'est venu un après qui m'apporte ces secrets-là.
Les odeurs que je ne percevais pas, je les sens, les sons que je n'entendais pas, je les entends, et dans ma tête en direct, des sensations étrangères me parviennent.
Les fleurs de Michel Misère ont pour lui des couleurs nouvelles, je vois comme il voit jusqu'à leurs fines racines dans la terre, chaque gouttelette d'humidité qui forme les nuages de son ciel définitif, à travers sa serre je la vois comme lui.
Je sens ce que sens Fabiola, loin, loin, je pense les pensées du Léon.
Oh! Je sens tant de choses et tant et tant, malgré que mon cerveau pourrisse, parce que je suis mort et que la décomposition me mange à toute vitesse.
Et cette chose qui me possède me dit:
Tu vas t'emputréfier, tes fluides pestilentiels
s'écoulant lentement nageront dans les flots
vibrants jaillissant des autres morts.
Tu disparaîtras de l'esprit et du cœur des
hommes et jamais, jamais tu ne perdras
la conscience d'être.
- Ah, gémit ce qui subsiste de ce Jacques, c'est donc ça l'Enfer?