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Marité de Vos K
marite de vos k.
12 janvier 2011

Encore faim

- Je ne te manque pas assez, dit Frédéric.

- Quoi !? je lui réponds vexée, c'est même pas vrai que tu ne me manques pas assez ! Pas assez pour quoi d'abord?

- Pas assez pour devoir m'écrire.

- Ah ça.

- Oui, ça.

- Je ne veux pas que tu sois mort, je n'admets pas ton absence, tu as peut-être raison. Tu ne me manquerais pas assez ? Non, non, ça n'est pas ça, c'est que je n'ai pas besoin de l'écriture pour te faire vivre.

- Tiens, là maintenant, tu es là, tu me regardes pensivement, tu t'assois sur cette chaise sans fond qui me sert de porte serviettes, et puis tu files là-haut, encagné dans l'angle du plafond, maintenant tu fais l'andouille en flottant devant la fenêtre, je vois le ciel à travers toi. Voilà, tu es à et tu es là.

J'ai ajouté de la menthe sèche, que j'ai effritée entre mes doigts, à la soupe que je viens de faire. Quand elle a été cuite, je l'ai mixée très fine, je l'ai trouvée bonne, toi tu as dit elle est excellente, je t'ai entendu.            

C'est comme ça, je n'ai pas besoin de t'inventer.

- Eh bien il faudrait figure-toi, parce que que je veux rencontrer d'autres gens, avoir des relations avec plus de monde, quand bien même ça ne serait que des relations de flottement entre deux ciels. Mets toi au boulot. Termine ce manuscrit, ça me donnera de la présence pour d'autres que toi.

- Je suis égoïste, c'est ça ! Ben dis-le, hein, c'est ça, je suis la grande sœur qui ne pense qu'à elle !

- Oui.

Et il s'est évaporé par la vitre un peu sale du bureau. J'espère que ça ne va pas lui coller à... à je ne sais quoi. Que ça ne va pas lui coller.

Depuis qu'il est mort, il a presque tout le temps raison, si je l'envoie se faire voir, il aura pleins d'occasions de se tromper.

C'est une bonne idée.

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1 janvier 2011

Deumille quoi?

Hein ? Quoi ?
Brouhaha dans la rue, silence dans l'Appartement et puis le contraire.
Du monde partout, derrière les portes, sur la table et sous la table, dans le réfrigérateur, sous le lit, jusque dans les angles des plafonds, des regards, des voix, des questions.

- Hein ?

- Deumil quoi?

- Deux mille onze.

- Bon.

Que dire à ces vagues affluentes, est-ce qu'elles sont vraies ces histoires de terre qui tourne sur un axe en biais autour d'un soleil indifférent.

Est-il est vrai que cette rotation autour de celui qui s'en fout durerait trois cent soixante cinq jours et quart.

Et pour finir, je suis agacée par cette situation qui nous met à la merci de qui sait tout ça et nous octroie, tous les jours à la même heure la (bonne) date.

- Bien, conclut Dolstein, cette année commence par des questions auxquelles nul ne répond, quand sommes-nous, où sommes nous, et les étagères.

- Et sommes qui donc nous ? réponds-je facétieuse parce que moi je suis de bonne humeur, mince alors ! dis-je à mes colocataires.

Ils répondent aussitôt, frétillants de leurs joies et impatiences, se rassemblant dans le trop étroit, pour cette foule excitée, Appartement
, et me hurlent dans les intérieurs qu'ils se souhaitent et à moi aussi une année, comment disent-ils ? une nouvelle année, voilà, une autre, et qu'elle soit nouvelle.

En quoi ils et moi montrons notre grande sagacité et tout ça, car il est sûr que cette année sera, oui, et
nouvelle certes, jusqu'à ce soir et un peu plus.


29 décembre 2010

Je n'ai pas le Temps

- Le temps... dit Dracula sur un ton alangui.

A demi allongé sur un divan bas, dans le salon atelier de l'Appartement, il joue vaguement avec un des Issus que je lui enlève, ce ne sont pas des jouets.


Dracula me déçoit.

- La neige en hiver, c'est normal.

Il a l'air tellement fatigué. S'il n'était pas si beau, ses yeux noirs étincelants, ses lèvres pulpeuses, le nez droit, le front clair et ce teint lumineux, jamais blafard malgré qu'il soit mort depuis, depuis...  S'il n'était pas si beau il ferait peine à voir.
Je me demande à quoi il a passé sa nuit, je m'inquiète.

- Et Braise ?

- Braise dort.

Il dit ça avec un sourire stupide qui me rassure. Le sourire fat, le voici. Pour la première fois j'utilise ce mot désuet, mais c'est bien un sourire fat qui enlaidit le bien joli Dracula.

Bon, ils vont bien ces deux-là, ce n'est pas une raison pour lancer des conversations stupides sur le temps qu'il fait.

- Je ne parlais pas de ce temps-là dit Dracula.

J'oublie toujours qu'ils peuvent entendre mes pensées, ça amuse monsieur qui précise,

- Le Temps. Ce soit-disant Temps de la soit-disant Éternité, Saturne, Chronos, la Faucheuse et toute cette mythologie de bazar, mais tout de même le Temps ?

Ah, ce Temps ! C'est moi l'idiote pour le coup.

- Je ne crois pas à son existence, ce n'est qu'une invention contingente. Pour des raisons commerciales, il fallait bien arriver à faire marcher le monde au pas cadencé. Alors, ils ont inventé le Temps, qui passe, pour tout le monde à la même heure. Le Temps qui encadre la vie, il fallait maîtriser ça aussi, un début, une fin, et personne n'est responsable de rien, de la naissance à la mort, c'est le Temps qui impose sa Loi.
Tu parles! Le Temps n'est rien.

Dracula sourit, toute fatigue effacée, je sais ce qu'il pense moi aussi.
Il est la preuve que le Temps n'existe pas. Ce qui existe c'est le sang, c'est Braise, et la vitalité de leur désir poignant et leur amour comme un oiseau palpitant.

Je n'ai pas le Temps, le Temps ne m'a pas


20 décembre 2010

Bon sang mais c'est bien sûr !

Un vieux machin se tenait devant moi, tête baissée, mains nouées, tout son corps crispé témoignait de sa confusion.

Il venait de nulle part chez moi, d'aucun manuscrit, d'aucun rêve, rien.

- Pourquoi êtes-vous ici?

- Mais chère petite, (crétin pensai-je très fort et il n'entendit rien, preuve qu'il n'était pas de moi) je suis partout chez moi quand arrivent les fins décembre.

- Genre la neige ?

- Oui, dit-il en relevant la tête, croyant en ma bonne volonté, sauf que moi je tombe partout, même en Californie par exemple.

- Vous êtes une sorte de Père Noël ?

Il s'épanouit dans un tourbillon, passant d'un coup du vieux bonhomme étriqué en costume sombre à un monstrueux obèse rubicond en drap rouge bordé de fourrure de bébé phoque.

- Ah, mon enfant, tu te souviens donc de moi.

- Pas de vous monsieur, non, je ne me souviens pas.

Il ne savait plus quoi dire, il se dégonfla dans la seconde, son costume toutefois ne disparut pas. Il était ridicule, son habit trop grand l'entourait comme un paquet cadeau mal ficelé et lui, piteux, ne savait comment sortir de son embarras.

Je décidai de lui expliquer la chose, car je fus une gentille petite fille.

- Le vrai Père Noël, mon vieux, personne ne l'a jamais vu. Celui auquel je crois encore malgré tout, est invisible et bienveillant. Il donne des preuves, c'est très mieux, voire extrêmement formidable, que les protestations oratoires. On appelle ça des cadeaux.

- Donnez-moi une chance, tenta l'imposteur.

- OK bonhomme. Je voudrais une pince à œillets, avec des œillets.

- Pas de problème.

- Et pas une merdouille bradée sur Internet, une vraie, du matériel de pro, pour faire des beaux trous ourlés de métal inoxydable et brillant.

- Ah oui. Bon.

- Et pas non plus une plaisanterie à la mords-toi l'nœud, comme un bouquet d'œillets avec une pince à épiler.

A la tête qu'il fit, je vis qu'il avait compté me rouler dans la farine.

- Voilà mon gars, à toi de jouer.

Pfft et pfft, il se dissipa dans l'air chargé de doute.

N'empêche, maintenant, je l'attends ma pince à œillet...


10 décembre 2010

Où est Poussin ?

.Le Grand Ça-Qui-Pousse m'a été délégué par la force de la Chose, autrement nommée Inertie et dans mon cas Exécution: j'ai fait.

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La Marcelle en moi avait raison, il fallait des moustaches.

Aussi les bébés, dont je ne sais pas encore lesquels auront des yeux mais aucun n'aura de bouche.

bob_b_s_moustache
Les braillards silencieux


Sauf s'ils doivent parler.

Plaisir trouble de croire, le temps que ça dure, que cela se fait parce que cela doit se faire, je ne serais que le médium.
Mais je fais.

Les trois manquants des douze sont bientôt prêts aussi.

les_3__pingl_s

Trois Frankenstein attendant l'étincelle

Il me semble qu'il manque deux adolescents traînant l'unique rue du village, dormant dans la salle d'étude, chauffée nuit et jour.

J'ai leur image dans la tête, j'ai cherché en vain jusqu'à présent leur matériau, deux autres donc,  seuls.
Je ne sais rien pour l'heure de leur état civil, ils me le diront.

L'un d'eux me souffle à l'instant qu'il est surnommé Poussin, et qu'il n'a que sept ans.
Ah bon.

Et l'autre ne dit rien mais je sais que c'est une petite fille, elle a cinq ans.

Je ne comprends pas comment ils peuvent être à K. dans la rue, dans la salle d'étude, comment ils ne sont pas intégrés dans une famille?

Je saurai ça plus tard.


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8 décembre 2010

Fécondations in cogito

Je tournais en rond, comme d'habitude.

Tranquillement enfermée je cherchais comment nommer ces jeunes gens.

Sarasvati ? Shiva ? Vénus ? Jupiter ? Lune, soleil, Mercure ou Mars?...

Tout ça très fort, très symbolique, et ma foi, très satisfaisant, quand je fus saisie par une sensation de colère intense.
Je regardais en moi, ça ne venait pas de là, je regardais ailleurs, mais où ? Rien.

Une voix dans mon dos interrompit mes recherches

- Nous ne sommes même pas juifs, les flammes, Hannukka, on s'en fiche, les planètes, rien à faire, les dieux sont morts. On n'est pas des concepts.

- Vous êtes quoi ?

Je regardais sur la table mes derniers Issus alignés, des bébés plein les bras.

Un peu à part il y avait Marcelle, oui, c'était Marcelle, dans l'instant elle me transmit la suite.

Marcelle

Marcelle Marcelle

Ils ne veulent être ni juifs ni goyim, ils sont des vivants laïcs, c'est tout.

Je dois leur donner la moustache, plus la peine d'aller leur inventer des cheveux ou des oreilles, des nombrils ou des orteils, non, des moustaches, petites, carrées, c'est tout.

Ils n'ont pas de noms, ils ont des prénoms et des surnoms, Robert, Etienne, Johnny, Jean-Paul, Jojo le Boxeur, Riton Grand Slip, Rididine et la Mère la Cerise.

J'appris encore qu'ils n'étaient pas neuf mais douze.

Où sont les trois autres, me demandait en silence le groupe des neuf ? Où sont-ils ?

Ah bon, il y en a trois à venir ?
D'accord, ils me diront leur nom quand je les aurai faits, je suppose.

Je croyais qu'ils avaient besoin de bébés,

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Bébés attendant qu'on leur donne des yeux,
une bouche (et peut-être un nez)

mais non, ils veulent leurs trois camarades et de la réalité, pas des idées. Pas des grandes choses, des petites choses.

Douze, avec des moustaches et des chapeaux. Ah tiens, des chapeaux ?

- Oui, des chapeaux.

- Et quoi encore ?

- D'abord les trois manquants, les moustaches, les chapeaux, les surnoms.

- Mais j'ai préparé plein de bébés !

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Œufs fécondables

- Faites-en ce que vous voudrez.

Je ne peux pas les laisser comme ça, il faut les sortir de l'ébauche.

Myriam Kowski, la femme de Rashi Kypryh créera une pouponnière avec Anna-Magna sa sœur, la femme de William Kyjouh.

Ils ne sont que des braillards ordinaires. Je préfère cette version à celle des bébés ramassés dans les décombres et les fossés, comme des fleurs coupées dans les champs, du mélo déprimant.

Marcelle a retrouvé son inertie trompeuse, posée au milieu des siens, vides comme elle.

- Je ne peux plus tourner en rond, à vous regarder, je leur ai dit, j'ai à faire.


6 décembre 2010

Neuf moi (s) ?

Première fournée de mes jeunes gens, les trois plus clairs.

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Alors que je les regarde, tâchant de voir qui est homme, qui est femme, et comment ils vont s'appeler, Braise contemple rêveusement les autres habitants de K.

- Si tu regardes bien, me dit-elle, tu verras qu'il y a de moi dans Anna-Magna Kowski, la femme de William Kyjouh.

- Forcément il y a de toi, elle est comédienne. Mais ça n'est pas là que je te trouverais, moi.

- Et où donc ?

- Chez les Kypensz. Tsiporah te ressemblerais si elle était une vraie personne, et pas une créature.

- Mais je suis une créature ma chère, regarde, dit Braise avec la voix de Frida, son amie dont le timbre est aussi chaud et vibrant que celui de Delphine Seyrig.

Braise se plante devant moi et dans une profonde respiration elle grandit.
Pleine de beauté et de terreur, s
es yeux brillent, ses cheveux s'enroulent en sifflant sur ses épaules, ses dents semblent aiguisées, Dracula dit ha! ha! Braise le fait taire d'un regard et lance depuis ses ténèbres enluminées:

- Si je ne suis pas une créature, alors que suis-je ?

D'accord, d'accord, Braise aussi est une créature, ce sont tous des créatures mais je me défausse de toute responsabilité.
Je n'y suis pour rien, tout juste puis-je admettre que je sois leur médium.

Ils passent tous par moi et je constate à quel point je ne maîtrise rien.

Mes derniers-nés en sont l'exemple, ils sont neufs, ils portent ces bébés ramassés dans les fossés et les décombres.
(Ils me manifestent ainsi qu'il n'y en a pas assez, d'accord, je leur en ferai encore.)

les_neuf

Mais, voyons, ces neuf-là, il leur manque quelque chose.


C'est la vie qui manque, que je ne sais où prendre. Je dois attendre qu'ils me le disent et alors, oui, je pourrais poser la flamme.

Finalement, ce n'est pas si mal de n'être qu'un truchement, que leur Dieu se débrouille.


17 novembre 2010

Lizzie

Alors il y a cette Lizzie, Lizzie Je-ne-sais-qui, à qui j'ai promis ce quelque chose, enfin, alors, euh...

- Alors quoi ? Alors quoi ? Dites-le, mince alors, pourquoi je saurais pas, hein ? Pourquoi je saurais pas qui je suis ?

- Je préfèrerais laisser venir ça tranquillement, je préfèrerais ne pas dire n'importe quoi, c'est à dire que je préfèrerais ne pas m'en remettre à la vérité, je préfèrerais inventer.

- Mais je m'en fiche moi, de ce que vous préférez ou pas, je veux savoir, tout, tout de suite !

- Oh alors, tant pis, ce sera la vérité.

Lizzie s'est assise, puis elle s'est levée, elle allait d'une pièce à l'autre, elle tournait en rond, puis elle s'est rassise, elle attendit la suite.

Elle était surexcitée et moi j'étais mal à l'aise.

J'aurais voulu avoir le temps de lui inventer une vie qui la satisfasse, dans laquelle elle se sente exister, du sur mesure, au lieu de quoi, pour cause d'urgence, je devais procéder sans distance, sans fards.

Bon, je me suis dis, c'est elle qui l'a voulu.

J'étais de mauvaise foi, Lizzie n'a rien voulu, elle ne peut rien vouloir, elle n'est qu'un personnage de papier.

Et ça me dérange que ça me dérange mais c'est comme ça, je peux la recevoir, je peux l'agréer mais la vie que je peux lui offrir ne vaut pas tripette pour ce qu'elle ne viendrait pas de mes tripes, ces tripes particulières, blotties dans la boîte crânienne, faites de tuyaux soudés, de circulations invisibles productrices d'étincelles aléatoires.

Lizzie donc, espérait, patiente à présent, touchante, elle attendait de naître.
Est-ce que je serais capable d'aller au delà de la vérité pour lui ouvrir les portes ?

- Premièrement, tu ne t'appelles pas Lizzie, ton vrai nom c'est...

- Elizabeth !

- Pas du tout. Tu t'es appelée Jacqueline Banault, tu vivais dans une cité d'urgence de la banlieue de Paris.

Tu voulais être comédienne mais là où tu vivais, les  filles ne devenaient pas comédiennes.

Il y a eu un garçon, puis un autre et plein d'autres, tu as eu beaucoup, beaucoup d'enfants.

Des filles exclusivement.

Parce qu'ils te jugeaient incapable (et le fait est que tu l'étais, incapable), les sevices  (il semblerait que le manque de r pour services soit un lapsus mais je me demande) sociaux te les enlevaient tout juste nées.

Elle me regardait toujours, des larmes coulaient doucement sur son visage lisse, elle avait les yeux vides, elle n'avait plus qu'une seule dimension, plate.

J'ai pensé elle est en train de fondre, elle va redevenir la fille de papier.

Est-ce que je pouvais dire sa vérité à mademoiselle pâte à papier ?

Tu n'existes pas, tu es une ébauche, tout juste assez formée pour figurer dans des romans médiocres et servir de pantin à des auteurs en mal de personnage?

Est-ce que j'en étais si sûre ?

Avec le doute enfin jaillit la lumière et je vis et je sus qui elle était, vraiment.

- Mademoiselle, je lui ai dit, arrête de te morfondre et écoute-moi bien, maintenant, je vais te dire la vérité. Voilà ce qui s'est passé: Jacqueline a disparu, elle était trop malheureuse, mais son rêve n'a pas disparu, lui.
Tu es ce rêve, cette Lizzie qu'elle rêvait d'être, c'est toi, mais...

- Quoi, mais quoi ?!

- Mais tu es une parmi les autres. Toutes les filles de Jacqueline sont un éclat. Tu dois les retrouver toutes, et alors seulement, vous formerez ensemble le rêve complet et tu-vous deviendrez une, complète, une grande comédienne et d'abord, une femme, une vraie.

- Vous m'aiderez ?

Et oui, j'allais l'aider, la clarté jaillissante de sa réalité m'avait prise par surprise, je l'avais adoptée, elle avait ranimée en moi cette Jacqueline malheureuse.

Pfff. Je n'avais pas besoin d'être une autre encore.

- Je vais te dire ton nom secret, il est ta certitude et ton vaisseau insubmersible: tu t'appelles Jeanne.

Elle a repris couleurs et volume et s'est évaporée en rêvant vers sa quête, et moi, j'ai remisé ma baguette magique et mon costume de marraine fée, et j'ai pensé à cette Jacqueline B. des Emouleuses, qui voulait être comédienne.

 

11 novembre 2010

Art Kaïque

Une bande de gamins s'est éparpillée dans l'Appartement, des fillettes, des garçonnets, des nourrissons, des filles et des garçons de toutes couleurs, de toute origines, de tous genres,  avec lunettes, qui en couches culottes, qui en langes, sanglés comme autrefois, d'autres bébés tout nus.
Il y a des fillettes aux nattes si serrées qu'elles tirent leurs yeux vers les tempes, d'autres aux cheveux noués de satin pâle, avec des franges, sans franges.

Est-ce ma partie K qui se manifeste avec fra-K ?

Que non, ça vient de plus loin, car il y en a une, plantée devant moi, que je reconnais .

Elle a les cheveux courts, en vrac, un pantalon de garçon, de grosses chaussures de montagne, elle a un pull en V trop grand, un col blanc douteux là-dessous, elle a le regard triste et le sourire franc,  c'est moi à dix ans.

- D'où est-ce que vous sortez tous?

- Ben, on vient de ton rêve de cette nuit.

- Ah! C'était vous ces colonies d'enfants abandonnés que je devais convoyer je ne sais où, remettre à des gens dont je ne savais pas ce qu'ils feraient de vous. C'est vous la honte et la peur?

- Ah, non, dit-elle, pas la honte, pas la peur, nous sommes ceux d'avant.

- Ceux d'avant quoi?

- Ceux d'avant ceux de ton rêve, nous sommes tes archaïques, des ancêtres bénins.

Elle ne sait pas ce qu'elle dit cette petite moi, ancêtre bénin, c'est joli mais ça n'a pas de sens.

- Ce que tu ne comprends pas peut avoir du sens, me répond-elle.

J'oublie toujours que dans l'Appartement n'importe qui peut lire mes silences sans obstacle.

- Je ne suis pas n'importe qui me rappelle moi.

Et elle enchaîne pour m'expliquer, puisqu'il faut m'expliquer ce que je sais déjà puisqu'un de mes moi le sait.

- Nous sommes bénins, nous ne transmettons aucune des conséquences que nous portons Nous  ne sommes que des passeurs de relais, nous avons disparu dans les adultes que nous sommes devenus.

- C'est bien facile ça, vous n'êtes pas que des supports, vous vous êtes faits aussi. Ne fais pas l'innocente.

Elle me regarde avec ses yeux tristes, je lui ai parlé comme à une adulte elle ne peut pas comprendre.

- Bien sûr que je comprends, je me demande qui est cette personne que je suis devenue. Tu as oublié qui tu es?

- Non, je soupire, non je n'ai rien oublié, mais j'ai parfois envie de ne rien savoir. C'est qui tout ce monde?

- Tu n'as qu'à leur demander.

Ils m'ont répondu en rafale, il y avait là Michel Troudy, Mani, Rachel Z. et Rachel L. les Albert, Alice, Paulette Dolstein, Suzanne Troudy, Frida, Louise Kowski, Astrid T., Jacques L., Robert Dieu, Bruno Ragazzi, Léon, et tous les autres. La cohorte de mes personnages, enfants, bébés, certains dans plusieurs étapes. Frédéric était le plus nombreux, avec mes moi aussi.

- Qu'est-ce que ça veut dire?

Leur réponse n'a été que leurs yeux vides fixés sur moi, et tout de même, la compassion d'un moi.

La Marité de dix ans m'a dit, si tu veux vraiment savoir, pense à autre chose. Ou revient demain, si on est encore là, peut-être qu'on pourra se dire quelque chose ?

Un embryon de réponse (ah, m'a soufflé un moi nourrisson) a filé dans un coin de mon cerveau, aussitôt évaporé, dont je n'ai retenu que ces mots obscurs: un numéro de sens.

 

9 novembre 2010

Beuhhh

Et bien ça n'était pas une bonne idée, rien d'autre à dire.

Nous en avons tous mangé, tous les parfums, tous les arômes et vraiment ça sentait bon.

Mais ça n'était pas une bonne idée, voilà, que voulez-vous que j'en dise, rien d'autre, pas une bonne idée.

Analyser la chose, je ne sais pas où ça peut mener.


Sur le fond je pense que nous avons eu tort de mélanger ce qui ne devait pas l'être, du flan réel dans des estomacs imaginaires, ça n'a pas donné le résultat escompté.


Nous sommes tous dépités, ou épuisés, ou vidés, ou un peu triste.


Demain nous aurons digéré tout ce flan, beurk, tout ce flan.

Le flan ce n'est pas si bon, c'est flasque et tremblotant, c'est pâle et mou.

Demain, demain ?


Demain, voyons, demain j'écrirai, voilà, oui, j'écrirai au lieu de cuisiner des mots qui ne finissent pas dans les bons registres.

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